La réforme de la carte judiciaire : Une occasion manquée
[ Tribune libre de Nicole Bonnefoy du 16/07/12 ]
La réforme de la carte judiciaire : Une occasion manquée
Dans un rapport du 11 juillet 2012, la Commission des lois du Sénat dresse un bilan très contrasté de la réforme de la carte judiciaire qui a abouti à la suppression de près du tiers des implantations judiciaires.
Engagée en juin 2007 et achevée le 1er janvier 2011, cette réforme devait garantir l’accès de tous les citoyens à une justice de qualité par une réorganisation de la carte des implantations judiciaires et une rationalisation de leur fonctionnement.
Or, dès son lancement, elle n’a pas manqué de susciter des controverses, notamment sur sa méthode parfois brutale. Très critiquée par les magistrats, les avocats ou les fonctionnaires, elle a également été montrée du doigt par les représentants des territoires ruraux qui ont vu fermer un à un leurs lieux de justice. La Charente n’a d’ailleurs pas été épargnée avec la suppression de 3 tribunaux d’instance, ainsi que du conseil des prud’hommes et du tribunal de commerce de Cognac.
Pourtant, un consensus existait sur la nécessité de réformer une carte judiciaire devenue obsolète, datant du 18e siècle, et qui n’avait plus fait l’objet de modifications profondes depuis 1958.
Forte de ces constats, la Commission des lois du Sénat avait donc décidé il y a quelques mois, de créer un groupe de travail chargé d’évaluer l’impact de cette réforme, à commencer par ses conséquences en termes d’accès à la justice et de qualité du fonctionnement des juridictions.
Après une trentaine d’auditions et plusieurs déplacements en France, ce groupe de travail vient de rendre ses conclusions dans un rapport intitulé : « La réforme de la carte judiciaire : une occasion manquée ».
Les auteurs du rapports tirent les grands enseignements suivants :
• cette réforme a été menée dans la précipitation, sans concertation et de manière parfois brutale, comme s’en sont plaints les professionnels,
• elle a été conduite à l’envers : la réflexion sur les implantations judiciaires précédant celle sur les missions de la justice et l’organisation judiciaire,
• elle a principalement touché les plus petites juridictions à commencer par les tribunaux d’instance dont plus d’un tiers ont été supprimés (178 sur 476),
• elle a globalement eu un effet négatif pour les justiciables même si elle a rendu possible une rationalisation du fonctionnement de certaines juridictions et la disparition d’implantations judiciaires qui n’avaient plus lieu d’être.
Ainsi, le rapport note que les délais de traitement des affaires ordinaires ont augmenté significativement, la réponse judiciaire a perdu en qualité, et l’accès à la justice a été contrarié, ce qui a pu conduire des justiciables à renoncer à faire valoir leur droit.
En outre, et sans surprise, cette réforme a contribué à aggraver les déséquilibres territoriaux avec l’apparition de déserts judiciaires.
En conclusion, le rapport indique que le chantier de la carte judiciaire reste ouvert et qu’il est nécessaire, de poursuivre les réflexions afin de mettre en œuvre une nouvelle organisation judiciaire qui garantisse l’accès au juge de tous les justiciables.
Pour plus d’informations, je vous invite à consulter l’intégralité de ce rapport sur senat.fr
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