Réforme des collectivités et suppression de la TP : les sénateurs de Charente sonnent la charge anti-Sarkozy
[ Article de la Charente Libre du 22/10/09 ]
Nicole Bonnefoy et Michel Boutant demandent aux 404 maires de Charente de s’opposer à la réforme de la taxe professionnelles et à celle des collectivités territoriales. ( Lire le courrier )

La démarche est sans précédent. Les deux sénateurs charentais, Nicole Bonnefoy et Michel Boutant – également président du conseil général -, viennent d’adresser un courrier aux 404 maires du département. Ils les prient, arguments à l’appui, de soumettre deux délibérations à leur conseil municipal pour s’opposer à la réforme de la taxe professionnelle (TP) et à la réforme des collectivités territoriales (lire CL d’hier). Ils ne rejettent pas l’idée même des réformes, mais dénoncent leur contenu, la manière dont elles sont imposées et surtout leurs conséquences, mortelles selon eux pour la décentralisation. Dès la semaine prochaine, les deux élus entameront un tour de la Charente en dix étapes (1) à la rencontre des élus locaux pour nourrir le débat.
«Les attaques de l’État sont régulières, de fermeture de classes en suppression de tribunaux, de réforme des Douanes en fusion des services décentralisés de l’État. Chacun peut aujourd’hui constater la désagrégation du service public, pourtant absolument nécessaire dans les départements de taille modeste. Le pacte républicain est en danger», écrivent d’entrée les deux sénateurs après avoir rappelé le succès de la votation pour la défense du service public de La Poste à laquelle ils s’étaient associés le mois dernier (17.000 personnes avaient participé à cette sorte de référendum en Charente).
«La volonté de recentraliser»
Michel Boutant, né et ancré dans la ruralité (Chabanais puis Montbron), est effrayé à l’idée de voir se développer, dans le cadre de cette même réforme territoriale, huit grandes métropoles (dont Bordeaux et Lyon). «Entre les deux, si cette réforme aboutit, on aura un grand désert», prédit-il. «Alors que dans la crise l’État demande aux collectivités locales d’être à la fois des amortisseurs sociaux et des investisseurs de premier rang, les projets de réformes précités visent à rogner, voire à supprimer leur capacité d’agir», martèlent les deux sénateurs aux élus locaux dont, faut-il le rappeler, ils tiennent leur mandat à la Haute Assemblée.
Pédagogiques, ils expliquent les conséquences de la suppression de la clause générale de compétences dans la nouvelle organisation territoriale. Départements et Régions auraient des compétences spécifiques bien arrêtées et donc des champs d’intervention interdits. «C’est mécaniquement une limitation des financements croisés, des possibilités de financement par les Régions ou les Départements de projets communaux. C’est la preuve de la volonté de recentralisation de l’État.»
Ils estiment encore que la réforme de la taxe professionnelle contribuera inévitablement à faire basculer la charge de l’impôt sur les ménages, le plus souvent modestes dans le département (un sur deux seulement paie l’impôt sur le revenu). Dès lors, les collectivités territoriales ne disposeraient à l’avenir, pour financer le service public local, que de ces seuls impôts puisque la TP serait remplacée par une dotation d’État.
Absence de propositions…
«Autant dire que c’en est fini des politiques locales, des stratégies territoriales, des actions volontaristes dans le domaine de la culture, du développement économique, de l’enseignement supérieur ou encore du sport», poursuivent les deux élus qui vivent ces projets de réforme «comme une véritable défiance envers les élus locaux et les collectivités territoriales», qu’ils gèrent. «Des projets qui, s’ils sont menés à terme, aboutiront à faire des élus locaux de simples agents de l’État», assurent-ils.
«Pour toutes ces raisons, concluent les deux élus, il nous paraît urgent de s’opposer avec fermeté aux projets présentés par le gouvernement, véritable fossoyeur de la décentralisation.» Suit la délibération à prendre et à renvoyer aux sénateurs.
Si le ton de la lettre comme les arguments ne manquent ni de panache ni de conviction, Nicole Bonnefoy et Michel Boutant pèchent en revanche par la force de proposition. Ils ne répondent pas, ou pas encore, aux questions légitimes que les électeurs et citoyens se posent sur un empilement de structures territoriales – communes, communautés de communes, pays, département, région – qui ne garantit ni l’efficacité, ni l’économie de fonctionnement.
Auteur : Ivan Drapeau
Pratique :
Les réunions-débats avec les élus locaux : jeudi 29/10 à 18h30 à la salle polyvalente de Saint-Amant-de-Boixe ; vendredi 30/10 à 18h30 à La Canopée à Ruffec ; jeudi 5/11 à 18h30 à Barbezieux ; jeudi 12/11 à 18h30 à Segonzac ; vendredi 27/11 à 18h30 à Confolens ; jeudi 26/11 à 18h30 à Chasseneuil ; jeudi 3/12 à 18h30 à Angoulême ; jeudi 10/12 à 18h30 à Jarnac et vendredi 11/12 à 18h30 à Chalais ; jeudi 17/12 à 18h30 à Montbron. Sous réserve de modifications…